Peut on être un combattant et végétarien (ou végétalien) ?

Végétarien : Personne qui ne consomme aucune chair animale (viande, poisson).

Végétalien : Personne qui ne consomme aucun produit issu de l’exploitation animale (viande, poisson, miel, lait, etc.).

Si vous ne l’avez pas encore fait, je vous conseille de lire notre article sur les bases de la nutrition. C’est un excellent point d’entrée et je vais me servir des notions qu’il aborde.

Quand on parle d’un combattant on s’attend généralement à une musculature impressionnante. Or, dans la croyance commune, qui dit muscle dit protéine et qui dit protéine dit chair animale. De plus pour éviter les blessures un combattant a besoin d’os solides. Or qui dit os solides dit calcium et qui dit calcium dit produits laitiers. Ça commence plutôt mal pour les végétariens et végétaliens non ?  Ensuite les personnes plus éclairées en nutrition vont parler du manque d’acides gras polyinsaturés (oméga 3) que l’on trouve dans les produits de la mer. Enfin ils parleront de la carence en vitamine B12, essentielle au bon fonctionnement de l’organisme, et qui se trouve uniquement dans les produits issus de l’exploitation animale.

Pourtant la liste des combattants connus qui sont végétariens ou végétaliens s’allonge de plus en plus. Parmis eux on compte les célèbres frères Diaz, combattants dans la plus célèbre organisation d’arts martiaux mixtes, l’UFC. Le plus jeune, Nate Diaz, est devenu particulièrement connu en soumettant Conor Mcgregor, star jusque-là invaincue à l’UFC. Pourquoi tous ces athlètes sont-ils devenus végétariens ou végétaliens ? Comment font-ils pour répondre à l’exigence nutritionnelle que demande leur discipline ? Est-ce envisageable pour un amateur ?

Pourquoi devenir végétarien ou végétalien ?

Mouton regardant profondément l'objectif du photographe
Photo de Trinity Kubassek

Le point de vue éthique

Les témoignages que l’on peut lire sur différents blogs ou visionner sur Youtube parlent très souvent d’une prise de conscience. Celle de réaliser qu’une grande partie des aliments qui composent notre assiette ont fait souffrir un animal. Cette souffrance est facilement concevable pour la chair animale, mais elle est moins connue pour d’autres produits comme le lait ou les œufs. C’est avec les documentaires Cowspiracy, Food Inc, Earthlings et les associations Vegan Society et L214 que cette situation a été révélée au grand public. Depuis, le mouvement végétarien et végétalien a pris beaucoup d’ampleur.

L’impact environnemental

La consommation de viande depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale a explosé. Un Français moyen consomme 2 fois plus de viande que ses grands-parents et 3 fois plus que ses arrière-grands-parents. Cette surconsommation de viande est problématique car l’élevage est responsable d’au moins 14% des émissions de gaz à effet de serre (rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture). De plus, tous ces animaux doivent être nourris. Les cultures de maïs et de soja à leur destination sont donc de plus en plus nombreuses et étendues, ce qui entraîne le déboisement des forêts mondiales. Dans le monde 70% de la surface agricole sert à l’alimentation des animaux. Enfin ces cultures sont très gourmandes en eau. A tel point que “si l’Occident suit ses habitudes alimentaires, l’eau disponible sur nos terres agricoles pour produire la nourriture de bientôt 9 milliards d’habitants ne sera pas suffisante” d’après l’Institut international d’étude de l’eau.

Comment en est-on arrivé là ?

La Seconde Guerre mondiale et ses privations ont poussé le gouvernement à rendre la viande accessible à tous. On a  alors modernisé l’élevage (zootechnie) en s’inspirant du modèle américain avec ses abattoirs et son travail à la chaîne. La viande qui jusque-là était un luxe est devenue un produit de tous les jours.

Et les végétariens et végétaliens dans tout ça ?

La logique des végétaliens est simple : l’élevage est un gaspillage de ressources. Les animaux ne sont pas d’excellents convertisseurs d’énergie (calories) car il faut produire entre 7 et 9 calories végétales pour obtenir 1 calorie animale. Donc, plutôt que de faire pousser beaucoup de protéines végétales pour obtenir peu de protéines animales, autant manger directement les protéines végétales et ne plus élever d’animaux. Ainsi les gaz à effet de serre seraient diminués et l’espace gagné servirait à la culture de végétaux.

En ce qui concerne les végétariens, vu qu’ils consomment des œufs et des produits laitiers, ils souhaitent continuer d’élever des animaux pour ces produits.

Une étude menée aux Etats-Unis s’est intéressée aux différents régimes alimentaires afin d’estimer lequel permettrait de nourrir le plus de population dans son propre pays.

Voici les résultats obtenus :

étude présentant le nombre de personnes nourries en fonction des régimes alimentaires

Cette étude est intéressante car elle prend en compte les terres exploitables. Or actuellement les terres qui servent à élever les animaux ne sont pas toutes adaptées à la culture des légumes. Donc certains espaces seraient perdus dans le cadre d’un régime végétalien. C’est pourquoi, à l’heure actuelle, des régimes qui continuent d’utiliser les animaux sont plus optimisés. Malgré tout, on remarque que le régime actuel de surconsommation de viande est de loin le moins efficace.

La santé et les performances

Les aliments comme la viande rouge, la charcuterie et la viande industrielle de mauvaise qualité apportent beaucoup de sel, d’acides gras saturés et d’omégas 6. Nous savons maintenant qu’une trop grande quantité de ces nutriments peut causer des problèmes cardio-vasculaires. Vu que les végétariens et végétaliens évitent ces produits ils sont beaucoup moins touchés. De plus, ils consomment plus de végétaux ce qui augmente leurs apports en micronutriments (vitamines et minéraux) favorisant ainsi un meilleur état de santé. C’est pourquoi on peut lire de nombreux témoignages de combattants qui se sentent plus endurants, plus forts et moins sujets aux blessures. Cependant, il est difficile de savoir si l’amélioration de leurs performances est due à l’arrêt des produits d’origine animale ou à leur alimentation plus riche en végétaux et produits de meilleure qualité.

Comment répondre aux exigences nutritionnelles ?

Les protéines

Un combattant a besoin de 1 à 1,5 g de protéines par kilo par jour (cela peut monter à 2 g pour les bodybuilders). Mais les protéines ne se valent pas toutes puisque certaines sont complètes tandis que d’autres sont incomplètes en fonction des acides aminés qu’elles contiennent. Vous êtes perdu ? Avouez que vous n’avez pas lu l’article sur les bases de la nutrition.

L’œuf est considéré comme le meilleur apport en protéines, ce qui est une bonne nouvelle pour les végétariens. Ensuite, mis à part la viande et les produits de la mer, seul le soja et ses dérivés apportent la quasi totalité des acides aminés essentiels. Mais manger du soja ou des œufs à tous les repas serait un peu lassant et, comme tout excès, pas forcément bon pour votre santé.

Comment faire ?

Il est temps d’aborder la question des associations d’aliments. Les céréales et les légumineuses sont de bonnes sources de protéines mais sont incomplètes. La bonne nouvelle c’est que céréales et légumineuses contiennent des acides aminés complémentaires. C’est pourquoi en combinant ces aliments, notre organisme va pouvoir assembler les différents acides aminés et couvrir ses besoins. La cuisine exotique regorge de recettes qui jouent sur ces associations : riz et lentilles (khichdi indien), blé et pois chiche (couscous maghrébin, falafel libanais), riz et haricots (feijoada brésilien), maïs et haricots rouges/noirs (burrito mexicain), etc.

Les vitamines et les minéraux

La fameuse vitamine B12

Si vous êtes un tout petit peu renseigné au sujet du végétarisme et surtout du végétalisme, vous avez déjà entendu parler de la vitamine B12. Elle est nécessaire au bon fonctionnement du système nerveux et du cerveau. Celle assimilable par notre organisme se trouve uniquement dans les produits d’origine animale. Les végétariens doivent consommer assez d’oeufs et de laitage (le camembert, l’emmental et le gouda en contiennent le plus) pour éviter les carences.

Une supplémentation en vitamine B12 est donc indispensable pour les végétaliens. On peut en trouver dans toutes les pharmacies ou les boutiques bio. La dose recommandée est de 2000 μg par semaine.

La vitamine D

La vitamine D sert entre autre à la bonne santé osseuse et favorise l’absorption du calcium. Elle a deux origines : l’exposition au soleil et l’alimentation (abats, poissons gras, oeufs et produits laitiers). Dans les pays peu exposés au soleil, particulièrement l’hiver, on constate dans la majorité de la population une faible carence en vitamine D, quel que soit son régime alimentaire. Il faut alors prendre la saine habitude de s’exposer 10 à 15 minutes par jour au soleil … ce n’est pas une excuse pour passer ce temps avec une cigarette !

Aucun aliment végétal (à part les champignons en faible quantité) ne contiennent de vitamine D. Donc, si vous êtes peu exposé au soleil, en tant que végétalien vous devrez trouver des aliments enrichis en vitamine D (yaourt ou lait de soja, céréales, jus de fruits …) ou vous renseigner auprès de votre médecin pour la prise de compléments alimentaires.

Le calcium

Chaque mouvement sportif sollicite la structure osseuse.  Il est donc important d’en prendre soin. Le calcium et la vitamine D fonctionnent en synergie pour favoriser la reconstruction des os après les micro-traumatismes liés à l’activité sportive.

Tout comme la vitamine D on le trouve principalement dans les produits laitiers, mais il est présent dans de nombreux végétaux (sésame, amandes, soja, fenouil, cresson et les différents types de choux). De plus, certains produits sont enrichis en calcium comme le lait d’amande ou de soja. Enfin n’oubliez pas que l’eau est une source non négligeable de calcium. Certaines eaux minérales plus que d’autres, notamment : Hépar, Courmayeur et Contrex. En fonction du sexe et de l’âge il est conseillé de consommer entre 800 et 1000 mg de calcium par jour.

Le zinc

Cet oligo-élément aide à la production de testostérone et donc aide à la prise de masse musculaire et à la réduction de la masse graisseuse. Sachant qu’il est évacué en partie par la transpiration, il est essentiel de surveiller son apport en zinc lorsque l’on est sportif. On en trouve principalement dans les fruits de mer (surtout les huîtres), la viande rouge, les abats et certains fromages (Mont d’Or, morbier). Du côté des végétaux on en trouve dans les céréales complètes, les légumes secs (lentilles, haricots), le soja et les noix/noisettes.

Chez les sportifs il convient d’apporter 12 à 25 mg de zinc par jour. Si en tant que végétalien vous n’arrivez pas à atteindre ces recommandations, il existe des compléments alimentaires dans les pharmacies et les magasins bio. Attention à ne pas dépasser les doses recommandées car le zinc devient toxique s’il est trop consommé ! Il est donc préférable de vous complémenter seulement si vous avez été diagnostiqué avec une carence en zinc.

Le fer

Lorsque les muscles n’ont plus assez d’oxygène ils produisent de l’acide lactique. C’est celui-ci qui cause la sensation de brûlure dans les muscles lorsque l’on repousse ses limites. Le fer permet d’oxygéner les muscles. Ainsi, une alimentation qui en est riche permet de tenir plus longtemps l’effort. Les sportifs et plus particulièrement les sportives sont sujets à la carence en fer (anémie), car celui-ci est en partie évacué par la transpiration et les menstruations.

Le fer contenu dans les végétaux (non-héminique) est moins facilement absorbé (5% contre 25% environ) que celui contenu dans la chair animale (héminique). Cependant, le taux d’absorption du fer végétal semble augmenter au fur et à mesure chez les végétaliens,  car le corps s’adapte. Les végétaux riches en fer sont les légumes secs, les céréales complètes, les épinards, les brocolis et l’ail. Pour mettre toutes les chances de votre côté, consommez de la vitamine C car elle aide à l’assimilation du fer dont les besoins sont estimés en moyenne à 9 mg/jour pour un homme et 16 mg/jour pour les femmes.

Les lipides

Un des avantages du régime végétalien est qu’il est très peu exposé aux graisses néfastes (acides gras trans) car elles proviennent en majorité des produits industriels issus de l’exploitation animale. Il est important de ne pas les confondre avec les graisses à limiter (acide gras saturés) qui, elles, ne doivent pas être exclues de l’alimentation. Ainsi, en tant que végétalien, faire une place raisonnable à l’huile de coco ou au beurre de cacao dans votre cuisine est une bonne idée.

Le point le plus important concerne les graisses essentielles : les acides gras insaturés et particulièrement les poly-insaturés (oméga 3 et oméga 6). Les omégas 3 présents en bonne quantité dans l’alimentation végétale (à travers les huiles de colza, de chanvre, de lin et de noix), sont toutefois moins actifs que ceux provenant  des aliments marins (poissons gras et algues). Et il a été démontré que ces derniers étaient essentiels au bon fonctionnement de l’organisme. Heureusement, notre corps étant une formidable machine, il est capable de les fabriquer à partir des oméga 3 des végétaux. A condition que ceux-ci soient fournis dans des proportions suffisantes ! (cf ratio oméga 3/oméga 6). Il est recommandé de consommer environ 2 g d’omégas 3 végétaux par jour.

Tous ces chiffres, je fais comment moi en tant qu’amateur ?

Stylo sur une feuille pleine d'équations

Justement, vu que vous êtes amateur, votre performance ne se joue pas au mg près de tel ou tel nutriment. Il s’agit plutôt de respecter ces recommandations pour être en bonne santé et donc pouvoir pratiquer votre discipline autant que vous le souhaitez.

Les valeurs recommandées par les organismes de santé sont exprimées sur une journée, or il est plutôt intéressant de se les représenter sur plusieurs jours voire une semaine. Pour être en bonne santé vous n’avez pas à respecter précisément chaque jour les doses prescrites. Sinon, imaginez le stress ! Ces chiffres vous permettent d’avoir une idée de vos besoins et des aliments qui y répondent. Petit à petit vous allez développer une connaissance suffisante des aliments pour savoir comment composer vos repas. Pour vous aider, nous proposerons des idées de recettes végétariennes ou végétaliennes.

Adopter un régime végétarien ou végétalien pour être en accord avec vos convictions est donc envisageable à condition de surveiller les points à risque qui ont été abordés dans cet article et d’effectuer cette transition progressivement. Au final, seule la vitamine B12 nécessite des compléments alimentaires quand on est végétalien ; le reste des nutriments est accessible si l’on est rigoureux dans la composition hebdomadaire de ses repas.

c’est uniquement à partir du moment où une personne décide d’arrêter de consommer des produits d’origine animale que son entourage s’inquiète pour son alimentation

Je souhaite souligner que les exigences nutritionnelles que j’ai développées sont tout autant valables pour un omnivore que pour un végétarien ou un végétalien. Ce n’est pas parce que vous consommez de la viande que vous devez négliger ces aspects. Bien souvent, c’est uniquement à partir du moment où une personne décide d’arrêter de consommer des produits d’origine animale que son entourage s’inquiète pour son alimentation. Pourtant manger tous les jours des pâtes au beurre accompagné de jambon ou de “cordon bleu” est plus inquiétant qu’un repas, étudié, composé uniquement de végétaux. Devenir végétarien ou végétalien permet souvent de découvrir un nouveau monde culinaire avec de nouvelles saveurs très riches et nutritivement intéressantes.

J’espère qu’à travers les différents articles d’Healthy Fighter vous saisissez l’importance d’une alimentation variée, et que vous découvrez de nouveaux produits bons pour vos papilles ainsi que pour vos performances ! Et n’oubliez pas que si prendre soin de soi semble prendre du temps, en réalité cela permet d’en gagner car vous vous éloignez des blessures et vieillissez en meilleure santé.

Pour aller plus loin, n’hésitez pas à visiter des sites spécialisés comme celui de l’association L214 ou Vegan Pratique.

 

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