Pourquoi le yoga et les arts martiaux vont-ils si bien ensemble ?

Comment peut-on associer le yoga, qui porte son attention sur la compassion et la bienveillance, avec les arts martiaux qui, eux, étudient le combat ?

La première erreur est de penser qu’apprendre à combattre signifie apprendre à être violent : au contraire, ces connaissances calment l’ego et apportent une sérénité qui permet de gérer au mieux les conflits. La seconde erreur est de croire que le yoga est un art “mou et ennuyeux” pas adapté aux “vrais athlètes”. Bien souvent, cette croyance disparaît après la “claque” reçue lors de la première séance…

Homme aux cheveux longs fatigué pendant une séance de yoga
Je m’apprête à créer ma propre posture : l’homme gros qui meurt

… mais elle empêche malheureusement certaines personnes de débuter leur pratique. Le yoga, pourtant, comme les arts martiaux, est composé de styles différents pour s’adapter à la personnalité de chacun. Certains sont axés sur le travail de l’esprit à travers la méditation (qui n’est pas molle et ennuyeuse non plus !) tandis que d’autres façonnent le corps… plutôt intéressant pour un combattant, non?

La gestion de la respiration

Parlons en premier de la respiration car c’est la clé de voûte du yoga et c’est à partir de celle-ci que vont se greffer tous les bénéfices qu’il apporte. Pour vivre, le corps inspire et expire de manière mécanique et inconsciente.

La force du yoga est de placer la respiration au centre de l’attention : elle devient consciente. Ainsi, le pratiquant peut travailler dessus et apprendre à maîtriser ses différentes formes : ventrale, thoracique et claviculaire. Chacune présente son intérêt dans la gestion des émotions. La respiration ventrale est plutôt lente et profonde et permet de calmer son esprit, tandis que les respirations thoracique et claviculaire sont rapides et placent l’esprit dans un état d’alerte. Beaucoup de gens n’ont malheureusement aucune connaissance de la respiration ventrale. C’est pourtant celle qui devrait être la plus utilisée au quotidien pour son action apaisante (régulation du rythme cardiaque et gestion des troubles intestinaux).

Et donc, moi qui combats, ça m’apporte quoi ?

Une bonne connaissance de votre respiration est un outil formidable, tout aussi important que la condition physique. Vous vous sentez mou avant un combat ? Une série de respirations thoraciques et claviculaires rapides, en vous répétant des pensées motivantes, va énormément booster votre combativité. Si au contraire vous êtes trop stressés, la respiration ventrale sera votre salut. Placez-vous dans un endroit calme et entamez une série de longues respirations en vous concentrant uniquement sur celles-ci afin de chasser vos pensées angoissantes et de vous concentrer sur le moment présent.

Être en excellente condition physique ne vous servira à rien si vous ne savez pas respirer correctement pendant un combat. Une des erreurs communes est de bloquer sa respiration  lorsque l’on fait un effort intense : par exemple, lorsque l’on essaye d’amener son adversaire au sol. Ce réflexe est très handicapant puisqu’il empêche de fournir de l’oxygène aux muscles au moment où ils en ont le plus besoin ! Après ce genre d’apnée, on doit récupérer l’oxygène dépensé : on est essoufflé, le rythme cardiaque s’accélère et les muscles s’acidifient (même si une alimentation riche en fer permet de limiter ce phénomène). Au contraire, un combattant conscient de sa respiration peut profiter des moments d’apnée de l’adversaire pour prendre l’avantage.

La souplesse

Le terme souplesse évoque : flexibilité, agilité, fluidité, adaptabilité… autant de qualités qu’un combattant doit posséder.

Pour les néophytes, gagner en flexibilité est souvent associé à de longues séances d’étirements  – de torture ? –  en forçant sur ses membres, le souffle coupé par la douleur. Le corps, par peur de se blesser, se fige et crée de la raideur (réflexe myotatique). L’idée du yoga est au contraire d’y aller lentement, mais régulièrement, afin de laisser au corps le temps de se mettre en confiance et de se détendre. Au final, les étirements sont agréables, et permettent d’éviter les blessures en renforçant la stabilité articulaire. Ce qui évite de développer des articulations très mobiles mais pas stable…bonjour les blessures.

Être flexible, en plus de faciliter les high kicks, permet aux lutteurs de supporter des situations inconfortables en attendant de retourner la situation…

Jeff Glover qui tente une clé de genoux sur Robson Moura
Je ne suis même pas fâché

On appelle parfois les enchaînements de postures des flow (flux, circulation). C’est exactement ce qui caractérise un yogi lors de sa pratique. A travers une respiration ininterrompue il chasse toutes les raideurs afin d’être agile et fluide. C’est aussi l’objectif d’un bon combattant, comme le pensait Bruce Lee :

The more relaxed the muscles are, the more energy can flow through the body. Using muscular tensions to try to “do” the punch or attempting to use the brute force to knock someone over will only work to opposite effect.Bruce Lee

[Plus les muscles sont détendus, plus l'énergie peut circuler dans le corps. Utiliser la contraction des muscles pour essayer de “faire” un coup de poing ou tenter d’utiliser seulement la force pour mettre son adversaire KO produira l’effet inverse].

La souplesse n’est pas seulement physique, elle doit aussi être gagnée mentalement. Il n’est pas possible de la développer si le corps et l’esprit ne fonctionnent pas ensemble. Un esprit stressé aura du mal à développer un corps souple et sans blessure. C’est pourquoi le yoga s’attache aussi à travailler l’esprit.

L’endurance

Un des aspects méconnus du yoga est sa capacité à développer une musculature puissante et endurante. Tant qu’on ne le pratique pas, on s’imagine que seule la souplesse est mise à l’épreuve. Alors que sans endurance musculaire, la souplesse et la respiration ne suffiront pas pour tenir certaines postures.

Le yoga ne cherche pas à obtenir des muscles visibles mais des muscles efficaces. Ainsi il travaille les muscles du tronc (le fameux core en anglais), le diaphragme et le plancher pelvien (votre conjoint(e) vous remerciera ;)). Il arrive que des personnes au physique pourtant impressionnant n’arrivent pas à finir une séance de yoga car ils ont négligé ces muscles “cachés”. Bien entendu, ce ne sont pas les seuls muscles à être sollicités. Les jambes aussi sont mises à rude épreuve pour tenir les postures debout, de même que les bras et les épaules lors des postures d’équilibre inversé.

Yogi qui fait un équilibre sur ses mains au bord d'une falaise pendant un couché de soleil
Photo de Fatih Altasov

la puissance d’un coup vient principalement des jambes, des abdominaux profonds et des articulations !

En plus d’améliorer la santé en prévenant les problèmes de dos (muscles du tronc) et en régulant le stress (diaphragme et périnée), la musculature développée par le yoga est particulièrement utile pour un combattant. On peut penser que pour être puissant il suffit d’avoir de gros bras et de gros pectoraux. Pourtant, dans les sports de percussion, la puissance d’un coup vient principalement des jambes, des abdominaux profonds et des articulations ! C’est la capacité à transférer la force provenant des appuis qui est déterminante, on appelle cela la chaîne cinétique. De même pour les sports de lutte, la pression infligée à l’adversaire vient de sa propre capacité à rester dans une posture puissante tout en fragilisant celle de l’autre.

L’équilibre

L’équilibre est la résultante des autres qualités développées par la pratique du yoga (respiration, souplesse, endurance …). C’est notamment grâce à la recherche de l’équilibre que le yoga est un formidable outil de récupération. Beaucoup de combattants se retrouvent avec un corps marqué par des années de pratiques : la tête et les épaules en avant, le haut du dos arrondi. C’est très utile pour protéger son visage et éviter les KO, mais ça peut créer des problèmes de dos. Le yoga propose de retrouver une posture équilibrée en travaillant les muscles oubliés et en étirant ceux trop souvent sollicités. En situation de combat, l’équilibre est essentiel. Il est impossible de porter un coup puissant si les appuis ne sont pas solides (cf chaîne cinétique). C’est encore plus évident pour les arts de lutte – notamment le judo – où le principe est de parvenir à faire chuter l’adversaire…

Gérer son temps entre le travail, les entraînements, la vie de famille et sociale, être attentif à son alimentation pour manger sain et varié, travailler son corps pour éviter les blessures et gagner en performance… être un pratiquant sérieux d’arts martiaux n’est pas de tout repos et ressemble souvent à un numéro d’équilibriste.

Homme qui se tient en équilibre au bord de la mer
Photo de JC Dela Cuesta

Le yoga est une quête perpétuelle de l’équilibre, il est d’une grande aide dans ce mode de  vie. Il répare les corps meurtris par des séances d’entraînement intenses et éclaircit les esprits stressés ou indécis dans leurs choix.

Annexes

Yoga for Bjj et et la chaîne YouTube associée propose plusieurs vidéos complètes gratuites. Sinon il existe un abonnement qui donne accès à des centaines de programmes adaptés à tous. Cependant toutes les explications sont en anglais.

Pour se renseigner sur le yoga : 3heures48minutes et mathide fait du yoga sont excellents et en français.

Voici un des blogs anglo-saxon le plus connu.

Et enfin un pratiquant de yoga qui a le sens de l’auto-dérision.

 

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